Le droit à la liberté d’opinion et d’expression constitue un fondement de la société libre et démocratique. Il est l’un des conditions essentielles de son développement et sa croissance, et est également une condition sine qua non pour la réalisation du développement complet des individus. Le droit à la liberté d’opinion et d’expression est essentiel pour toute société, et sa garantie est nécessaire à la jouissance de l'exercice de tous les droits de l’Homme. « Le système de cette liberté ne comprend pas seulement les opinions reçues positivement ou considérées comme inoffensives ou neutres, mais également les opinions qui énervent, choquent ou dérangent ».
Dans le cadre de sa stratégie basée sur l’effectivité des droits, le CNDH poursuit ses efforts pour l’appui et la promotion de divers formes d’exercice de la liberté d’opinion et d’expression.

Le Conseil souligne le besoin croissant pour la garantie de la liberté d’expression, qui continue de subir les effets des mutations progressives de l’espace public marocain du réel au virtuel, devenu incubateur de la liberté d’expression, ce qui montre la nécessité de fournir les garanties nécessaires pour l’exercice de ce droit au regard des progrès technologiques. Il insiste, également, sur la nécessité d’adaptation avec ces défis tout en préservant les droits des individus dans l’espace virtuel.

Il est à rappeler que le CNDH avait recommandé, dans son avis relatif au projet de loi n° 71.17 modifiant et complétant la loi nº 88.13 relative à la presse et l'édition, l’adoption d’une loi sur « la liberté de circulation de l’information » qui serait à même d’assurer une protection des nouvelles formes d’exercice de la liberté d’expression dans l’espace public virtuel. Cette loi pourrait constituer un nouveau pilier pour la liberté de la presse et l’édition, et participerait également à élargir le domaine d’exercice des libertés, à la lumière du développement des formes émergentes des expressions publiques dans les réseaux sociaux.

Dans le même sens, le CNDH considère que le traitement des problématiques imposées par les médias sociaux, comme canaux d’exercice de la liberté d’expression soulignant l’impérativité de passer du concept de la liberté de la presse « press Freedom » au concept de liberté des médias « media Freedom » dans l’encadrement du débat public.
Par conséquent, le CNDH exhorte les pouvoirs publics à veiller, lors de la gestion des problématiques en relation avec les nouvelles formes d’exercice de droit à l’expression, à s’inspirer des bonnes pratiques et les jurisprudences avancées de certaines expériences comparatives, en particulier en ce qui concerne la nécessité de traiter la question de la liberté d’expression de manière à garantir la protection de la liberté de la presse et de l’édition, tous supports confondus. Il exhorte les pouvoirs judiciaires à respecter les principes de proportionnalité et de nécessité, afin de ne pas porter préjudice au droit à la liberté d’expression, de presse et d’opinion, en les mettant à l’abri de toute peine privative de liberté. Il appelle, aussi, à l’augmentation de la subvention publique octroyée au secteur de la presse et de l’édition, dans le but d’élargir la diffusion et la promotion du pluralisme et de la diversité.

La liberté de manifestation

Le droit à la réunion pacifique est reconnu dans les conventions internationales, la Constitution et les dispositions juridiques compétentes. La pratique de la liberté de manifester au Maroc a connu un développement significatif au cours des dernières décennies, sous l'influence de l'utilisation extensive des réseaux sociaux pour la communication et la mobilisation. Ces plateformes sont devenues un espace où émergent de nouvelles formes d'exercice du droit d'expression et de protestation, différentes par leurs caractéristiques, leurs formes, ainsi que leur cadre temporel et spatial.

La transformation de l'action de protestation centralisée et légalement encadrée en une action de protestation répandue sur tout le territoire national, avec ses différentes thématiques et revendications, est le reflet d’une prise de conscience croissante des citoyens de leurs droits. Cette prise de conscience crée l'équilibre requis dans un société démocratique, entre l’exercice du droit de manifestation pacifique comme l’une des manifestations du droit à l’expression et les exigences du maintien de l’ordre public.

Le CNDH et ses commissions régionales (CRDH) veillent au monitoring des manifestations et rassemblements pacifiques dans tout le territoire marocain, que ce soient les manifestations thématiques revendiquant la jouissance des droits (le droit à la santé, à l’emploi, au logement, à l’éducation, à l’eau potable), ou les manifestations contre la cherté des produits de consommation, ou bien les manifestations de certains groupes professionnels, y compris les protestations des avocats contre le projet de loi de finances et les protestations des enseignants contractuels, etc. 
Les CRDH interviennent, dans certains cas, dans le cadre de la médiation et l’intervention préventive pour remédier à toute éventuelle violation.

La liberté d’association

La déclaration universelle des droits de l’Homme (article 20) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (article 22) garantissent le droit de constitution des associations. S’inscrivant dans cette logique, la Constitution marocaine a consacré par les dispositions du préambule et les articles 1er (§2), 6 (§2), 12, 13, 14, 15, 136 et 139 les garanties, les processus et les mécanismes relatifs à la liberté associative en particulier et à la démocratie participative en général. 

Le travail associatif au Maroc est, en outre, encadré par un ensemble de législations, entre autres, le Dahir n° 1-58-376 réglementant le droit d'association (B.O. 27 novembre 1958).
Malgré les garanties consacrées dans cette loi à la société civile pour exercer ses rôles en tant qu’acteur et partenaire des politiques publiques nationales et territoriales, le CNDH voit que la liberté d’association au Maroc est toujours confrontée à des défis qui affectent l’efficacité du travail associatif, et qui sont à l’origine de beaucoup de tensions entre les acteurs associatifs et les autorités administratives locales. 

Cela est dû, d’une part, à l'ambiguïté et à l'interprétation des textes juridiques encadrant la création des associations, et à leur incompatibilité avec la réalité des pratiques associatives et des nouvelles formes d'expression publiques d'autre part.