Le développement technologique et l’intelligence artificielle permettent de nouvelles formes d’exercer les droits et les libertés et la consolidation de la participation citoyenne. Néanmoins, les opportunités prometteuses garanties par ce développement, se trouvent face à des problèmes d’ordre éthique et des risques menaçant l’essence même des droits de l’Homme. Ces développements technologiques peuvent, en effet, porter atteinte à la vie privée des personnes, aux données à caractère personnel, au droit à la participation au processus démocratique, voire même exercer une influence sur les personnes, les induire en erreur en plus de la diffusion des fake-news. 

Conscient des liens existants entre le système des droits de l’Homme et l’espace numérique, le Conseil national des droits de l’Homme a intégré cette thématique dans ses principaux domaines de travail, soit à travers ses rapports annuels ou ses différentes activités. Dans son rapport annuel, au titre de l’année 2020, le CNDH a appelé à « ouvrir un débat public autour de la protection des droits de l’Homme dans le domaine de la technologie et les droits de l’Homme », il a insisté également, dans ses différents rapports, sur la nécessité d’imprégner les valeurs des droits de l’Homme de la technologie et ses usages, à travers notamment l’adoption des conventions internationales et la mise en place d’une stratégie numérique nationale qui repose sur les principes des droits de l’Homme, et qui consacre l’approche des droits de l’Homme dans les textes juridiques régissant ce domaine. 

Le Conseil insiste, aussi, sur la nécessité de prendre en considération la protection des droits de l’Homme lors de la conception et le développement des applications et algorithmes relatifs à l’intelligence artificielle, ainsi que le renforcement des moyens de recours judiciaires et extra-judiciaires des citoyens en conflit avec les nouvelles technologiques.
Afin de mettre en lumière les problématiques liées aux droits de l’Homme qu’engendre l’accélération du progrès technologique, le CNDH a lancé, depuis fin 2019, une série de concertations élargies avec une panoplie d’experts et d’acteurs dans le domaine de la technologie, et il a aussi organisé un forum national, en 2021, pour formuler des réponses collectives à ces défis. Le Conseil a intégré les conclusions issues de ces rencontres dans son rapport thématique publié en 2022, discutant de l’éthique de l’intelligence artificielle, et présentant les résultats du monitoring effectué sur les droits de l’Homme dans l’espace numérique et l’intelligence artificielle.

Et d’ajouter que le Conseil avait lancé en 2020 une plateforme interactive sur le droit à la liberté d'opinion et d'expression dans l'espace numérique intitulée « TaabiratRaqmya.ma », dans le but de contribuer au débat public sur les problématiques liées aux droits de l’Homme et la manière de relever les défis relatifs à la garantie d'exercice de nouvelles formes de liberté d'opinion et d'expression, et dans la réflexion collective sur les dimensions liées à l'éthique de l'utilisation des technologies numériques et des médias sociaux comme outils d'exercice des libertés. 

Cette initiative vise également à réfléchir à la manière de s'inspirer de certaines expériences et bonnes pratiques dans ce domaine, afin d'élaborer une charte déontologique nationale de l'utilisation de l'espace numérique dans l’espace public.

Dans le même contexte, le CNDH a organisé plusieurs activités en relation avec la thématique, entre autres, une conférence internationale en 2021, qui a connu la participation d’experts marocains et internationaux dans le but d’approcher les standards et initiatives internationaux des pays émergents dans ce domaine. Cette conférence a été couronnée par l’adoption de la Déclaration de Rabat sur "l'Intelligence Artificielle et la citoyenneté numérique : Pour une intelligence artificielle respectueuse des droits de l'Homme", qui englobe un ensemble de recommandations, et qui a donné lieu à la constitution d’un comité scientifique en charge de leurs mises en œuvre.

En ce qui concerne la relation entre le progrès technologique et la pratique médiatique, le Conseil a démontré, dans son avis publié en 2021 sur le projet de loi n° 17.71 modifiant et complétant la loi n° 13.88 sur le code de la presse, la nécessité d’élaborer des outils et méthodes innovants pour l’accompagnement des changements imposés par les TIC en général, et les médias sociaux en particulier, qui sont devenus progressivement les principaux canaux pour l’exercice de la liberté médiatique.

Fidèle à son engagement à contribuer à répondre aux défis imposés par la technologie aux droits de l'Homme, le CNDH a annoncé, en 2023, la création d’une division dédiée aux questions de la technologique et de la sphère numérique en rapport avec les droits de l'Homme, attachée directement à la présidente du Conseil. La mise en place de cette entité s'inscrit dans le cadre d'un processus enclenché par le CNDH pour observer les effets de l'utilisation de la technologie et relever les défis liés aux répercussions du numérique sur les droits de l'Homme, en plus de créer un équilibre entre le progrès technologique et la protection et la promotion des droits.