Louanges à Dieu,

Que la bénédiction et la paix soient sur le Prophète, Sa Famille et Ses Compagnons.

Messieurs,

Vous savez tous que depuis que Dieu a gratifié ce pays béni d’un Chef inspiré, de la Lignée du Sceau des Prophètes, Moulay Idriss 1er - que Dieu lui accorde Sa Sainte Miséricorde, qui appela à la parole de Dieu et à la conduite de Son Messager, - et jusqu’à nos jours, notre chère patrie n’a cessé d’avoir l’ambition d’occuper une place de choix au sein de la communauté internationale et un rang élevé parmi les Nations. Notre Histoire, grâce à l’esprit créateur qu’illustre une large contribution aux sciences, aux arts, à la civilisation et au droit, atteste que notre pays s’est toujours considéré comme vivant dans une société civilisée aux côtés des États et des nations évolués.

Aussi, notre pays, le Maroc a-t-il constamment fondé sa politique et ses plans sur le Livre de Dieu et la tradition de Son Messager - sur lui la bénédiction et la paix divines .

Chacun de nous reconnaît et a la conviction que c’est le Livre de Dieu qui délimite entre le vrai et le faux et que c’est la tradition du Messager - sur lui la bénédiction et la paix divines - qui est le droit chemin, cette autre voie après le Saint-Coran, dont ne dévie que l’homme voué à la perdition, tant elle assure la préservation des droits des collectivités et des individus et la sauvegarde de la morale et de la vertu qui marque l’Histoire des nations et la conduite des citoyens.

Nos Souverains - que Dieu les aient en Sa Sainte Miséricorde - suivirent l’exemple tracé par l’illustre fondateur de l’Etat marocain. Parmi eux, il y a lieu de citer tout particulièrement Notre Auguste Père qui emprunta cette voie et fut fidèle à la tradition.

Je me souviens que le jour où j’obtins la deuxième partie de mon baccalauréat, il me posa cette question :
 

- Sur quelle branche d’études supérieures s’est porté ton choix ?

- Sire, j’étudierai l’Histoire (car j’étais féru d’Histoire).

- Non, me répondit-il, il m’appartient de choisir. Tu dois suivre des études de droit. L’Histoire peut être écrite par d’autres. Quant aux droits de ton pays et de tes compatriotes, il n’y a que celui qui en est le premier responsable qui soit en mesure de les défendre.

Ainsi étions-nous éduqué et élevé. Ainsi désirons-nous éduquer notre Nation, notre peuple et les générations à venir, jusqu’à la fin des temps.
Aussi, avons-nous décidé de consacrer notre présente réunion non pas à la création, mais au parachèvement de l’Etat de droit, un État qui, avant tout, entend mettre un terme aux dires des uns et des autres sur les Droits de l’Homme, pour clore ce dossier.

Il s’agit d’autre part, de doter les citoyens du moyen juridique, diligent, sérieux et efficace à même de défendre leurs droits vis à vis de l’Administration, de l’autorité, et même de l’Etat.

Avant de poursuivre mon allocution, nous donnons instructions pour que lecture soit faite de la liste des membres que nous avons désignés pour siéger au Conseil Consultatif des Droits de l’Homme qui œuvrera à nos côtés. Ces membres, nous les avons choisis soit directement, soit de manière indirecte. En ce qui concerne les membres désignés indirectement, nous avons demandé à toutes les formations politiques, aux centrales syndicales et aux organismes représentant les professions libérales de nous proposer chacun trois candidats afin que nous retenions parmi elles les personnes qui siègeront au Conseil.

A cette occasion, je voudrais rendre hommage à ces organisations politiques, syndicales et professionnelles. Je leur rends hommage parce que les personnes qui nous ont été proposées sont toutes connues, Dieu en soit loué, pour leur droiture, leur conscience professionnelle et leur patriotisme authentique.

Les autres personnes que nous avons choisies directement, l’ont été en considération de leur personnalité, leur crédibilité, leur expérience et leur attachement à leur patrie.

Ainsi, vous pouvez, messieurs, cher peuple, constater que nous avons essayé de nous entourer dans nos options, notre opinion et notre jugement, du maximum de garantie.

Toutes ces personnes dont vous avez entendu les noms, grâces en soient rendues à Dieu, ont administré la preuve de leur patriotisme et de leur attachement à la réputation de leur pays, ne craignant que Dieu.
Nous allons apposer notre sceau sur le dahir portant création du Conseil. Pour ce qui est de ses grandes lignes, ce Conseil aura un président. Vous avez entendu son nom. Il aura également un secrétaire général , poste dont nous avons confié la charge à Monsieur MIKOU (1), le magistrat bien connu, un homme respectable et honnête.

Il a été décidé que le Conseil se réunira au moins deux fois par an et à chaque fois qu’il sera nécessaire : C’est à dire soit que nous le convoquions, soit qu’il se réunisse après la décision des deux tiers de ses membres, en vue d’examiner les questions qui lui seraient soumises.
Nous sommes excédés, tous les marocains sont excédés par tous ces propos tendant à faire croire qu’il existe au Maroc des prisonniers pour des raisons politiques.

Si l’on estime dans certains milieux que c’est un délit politique que de porter atteinte à Dieu - Dieu me pardonne cette évocation - à la Patrie et au Roi ou d’attenter à nos croyances et à notre Constitution, mon acception est tout autre, et je ne tiens pas vous influencer.
Y a t-il un seul Musulman qui puisse circuler à travers le pays pour dire embrassez telle autre religion que l’Islam ? Avant de se repentir, celui-ci devrait être soumis à un examen de son état mental par les médecins spécialisés. S’il persiste dans son appel à la conviction à une religion autre que l’Islam, religion de Dieu, il sera alors jugé et quelle que soit la sentence qui sera prononcée à son encontre, il ne saurait être qualifié de prisonnier politique.

Si un jour nous apprenons ou lisons qu’un Marocain a dit que telle région ne fait partie du territoire marocain, il ne pourrait s’agir, à Mon sens, que d’un renégat, un hors-la-loi qui ne pourra être considéré comme un détenu, un prisonnier politique.

Celui qui, par une affiche, un journal ou un discours appelle à un régime autre le régime de Monarchie constitutionnelle, Je pense qu’il n’a pas entrepris une action politique, mais a plutôt commis un acte subversif qui va à l’encontre de la volonté du peuple et de la Constitution.
Personnellement, Je crois que la conscience de ce Conseil consultatif sera tranquille à partir du moment où il considère que les trois valeurs sacrées de ce pays sont : Dieu, la Patrie, le Roi. Dès lors, personne ne peut dire qu’il y a des prisonniers politiques.

Bien entendu, les citoyens, même ceux condamnés par les tribunaux, ont des droits. Ils doivent être protégés de la faim, de la maladie, des abus, pouvoir recevoir les visites de leurs familles, obtenir les médicaments dont ils ont besoin, être examinés par un médecin, le cas échéant. Le système juridique et l’Etat doivent leur assurer toutes les conditions permettant la sauvegarde de leur dignité.

Du reste, une causerie a été consacrée, durant le mois de Ramadan dernier, à ce thème coranique : Nous avons honoré les Fils d’Adam.
Je voudrais, messieurs, que vous examiniez tous les dossiers qui vous seront soumis en toute liberté, en toute honnêteté. Bien évidemment, les Marocains devront ne pas confondre bureau de requêtes, Cour Suprême et Conseil consultatif.

Pour ma part, Je ne puis tout savoir. Je n’ai pas la possibilité d’avoir connaissance de toutes les informations. Je ne peux non plus connaître"être l’exacte situation carcérale, ici ou là. En revanche, il est de Mon devoir de redresser les mauvaises situations et de rendre justice à la victime de l’iniquité.

Vous serez le reflet de la réalité objective que vous pourrez approcher sous tous les angles en prenant en compte tous les critères afin que vous sachiez si elle relève de votre compétence, après quoi vous nous la soumettrez, dans les meilleurs délais possibles, accompagnée de vos recommandations qui devront aller dans le sens de la vérité et du droit. Il s’agit d’une responsabilité qui vous incombe, afin que, plus jamais dans ce pays, un homme, même condamné, ne soit privé de sa dignité et des garanties accordées par la loi.

Telle est la mission qui vous est assignée. Vous devez purifier le visage pur du Maroc. A tout propos, Amnesty International et d’autres viennent exercer sur nous leur contrôle, comme si nous étions encore sous Protectorat.

Je vous adjure, messieurs les membres du Conseil, en faisant appel à votre probité et à votre civisme, de m’aider à restituer son droit à quiconque en a été spolié, de m’aider à ce que, tous, nous parvenions à hisser ce pays au rang des pays civilisés où règne l’Etat de droit.
Je vous demande enfin de juger en toute sérénité si dans telle affaire les Droits de l’Homme ont été ou non violés. Dans l’affirmative, vous clamerez la vérité. Dans la négative, vous n’hésiterez pas à dire que les Droits de l’Homme n’ont pas été violés, qu’il y a eu mensonge, faux témoignage, falsification.

Il ne s’agit pas pour Moi de vous faire supporter toute la responsabilité. Désormais, cette responsabilité sera partagée. Nous l’assumerons vous et Moi.

Vous tiendrez donc vos réunions deux fois par an. Mais si les circonstances l’exigent, après décision des deux tiers des membres, vous vous réunirez encore pour examiner l’affaire qui vous est soumise et qui entrerait dans le cadre des Droits de l’Homme. Une telle affaire, après examen par vos soins, me sera soumise, accompagnée de vos appréciations, avec toute l’honnêteté qui est la vôtre, quelle que soit la profession que vous exercez, que vous soyez juristes, ingénieurs, médecins, représentants de partis politiques ou d’associations, auxquels nous vouons des sentiments d’affection et d’estime.
Il se pourrait que Je vous confie moi-même, pour examen, certains dossiers. Dans les deux prochaines semaines, Je vous soumettrai pour examen des dossiers à propos desquels Je voudrais d’ores et déjà que vous m’éclairiez, le but étant de rendre justice à ceux qui ont été lésés et laver l’affront qui nous a été fait à cause de l’indélicatesse de certaines personnes que Je m’abstiens de nommer.

Nous avons décidé que votre siège sera celui qu’occupait le Conseil des ministres arabes de la Justice, un siège où se tiennent plusieurs réunions inter-arabes. Vous aurez là-bas votre siège permanent et votre secrétariat.

S’il plait à Dieu, J’espère que vous tiendrez votre réunion inaugurale la semaine prochaine.

Afin que vous n’aviez à souffrir d’aucune contrainte matérielle, Nous avons décidé que vos frais et indemnités - car ce pays se doit avant tout d’indemniser, autant que faire se peut, chaque personne qui le sert, même si elle se porte volontaire pour le faire - seront non pas à la charge d’un département ministériel, mais sont dès à présent à celle des services du Palais Royal. Cela constitue, même si c’est purement administratif, un nouveau lien tissé entre vous et Moi.

J’implore Dieu de vous conduire au succès, d’éveiller vos consciences, d’éclairer vos décisions et de vous inspirer l’équité, afin que l’Etat de droit se perpétue dans ce pays. A son évènement, Moulay Idriss se réclama du Livre de Dieu, de la tradition de Son Messager et de ce Hadith : Je vous ai laissés sur une voie de toute clarté, ses jours ressemblent à ses nuits. Ne dévie de cette voie que celui voué à la perdition.

Il s’agit de la voie qui nous est tracée par le Livre de Dieu, la tradition de Son Messager, l’œuvre collective et la doctrine unifiée du rite malékite.
Telle est votre loi fondamentale. Je suis certain que tous, nous sommes Musulmans. Bien évidemment, nous sommes, tous, des croyants. Je suis un croyant et je crois que la perspicacité du croyant ne trompe pas. En vous choisissant, Je ne pense pas m’être trompé. N’oubliez pas que la conscience n’a besoin ni de protocole, ni de chambellan, ni de cabinet. Elle a besoin du contact direct et rapide. L’outil, pour vous, c’est le Secrétariat général. Si vous relevez une injustice, vous œuvrez à sa réparation, en exprimant de vive voix ou par écrit ce que vous aurez constaté.

Je suis convaincu que le Très-Haut vous inspirera clairvoyance, affirmera votre conscience profonde, votre respect du patrimoine et votre attachement à la souveraineté nationale. Nous aurons ainsi, avec l’aide de Dieu, fait œuvre utile.

Avant de clore Mon propos et de passer au second point, j’aimerai préciser que l’idée de former un Conseil consultatif des Droits de l’Homme n’est pas la mienne. Au début du mois de Ramadan, passant en revue la presse européenne, notamment française, J’ai relevé dans le journal "Le Monde" que notre cher ami le président François Mitterrand a convoqué le Conseil consultatif des Droits de l’Homme. Peu de gens, même parmi les Français, ne savaient qu’il existait un tel Conseil. Je crois qu’il n’y a et ne doit y avoir aucun complexe pour qui recherche la vertu et est en quête de savoir. Nous sommes une Monarchie constitutionnelle. Votre Souverain et Serviteur est issu de la Lignée du Prophète, sur Lui paix et bénédiction, et nous sommes Musulmans. Sans complexe aucun, nous avons retenu l’idée du Conseil consultatif des Droits de l’Homme créé par le président François Mitterrand qui, avant d’être élu président de la République, était premier secrétaire du Parti socialiste. La science est l’objet par excellence que convoite le croyant, de même que la justice.

Ce que vous avez là n’est pas de moi. Je l’ai recopié presque point par point sur un Conseil consultatif institué par un gouvernement et un président français socialiste. Grâce à Dieu, de par notre Monarchie constitutionnelle et ma foi en la justice. Je ne trouve en moi aucun complexe. Je vous dis que nous avons pris pour référence la philosophie d’un Parti socialiste. Il s’agit là d’un acquis au Maroc. Notre père à tous, Feu S.M. Mohammed V, disait du Maroc qu’il est un trait d’union, se trouvant à la croisée des chemins et des courants. Nous louons Dieu de nous avoir placés là où nous sommes, en cette position géostratégique et de nous avoir, à nous Marocains, inspiré la souplesse dans nos idées.
Nous louons le Très-Haut de nous avoir donnée la force et la vocation de nous adapter à l’ouverture sur toutes les civilisations, les cultures et tous les courants, dès lors qu’ils sont compatibles avec nos principes et notre vertu.

Maintenant, Je crois qu’il faut passer au second point. Nous avons d’abord évoqué les Droits de l’Homme. Peut-être leur avons-nous accordé plus qu’il n’en fallait. Malheureusement, la politique, comme on dit, est ce qu’on croit et non ce qui existe. La réalité politique, rares sont ceux qui la connaissent. Vous devez donc et c’est là désormais votre rôle, expliquer aux gens ce qu’est la réalité politique, juridique et judiciaire de ce pays.

J’en arrive au second point. Si nous voulons réellement construire l’Etat de droit, il est de notre devoir de prendre en considération les droits des citoyens vis-à-vis de l’autorité, de l’Administration et de l’Etat.
Au Maroc comme dans tous les autres pays, même ceux non socialistes et donc libéraux, l’Etat se voit obligé d’intervenir aux plans social et économique.

Comme l’avait entendu notre génération, la vôtre, vous professeurs de droit ici présents, on disait en français :l’Etat n’hésite pas à enlever son képi pour entrer dans les affaires des autres.

En termes clairs, eu égard aux engagements sociaux de l’Etat et au fait de la nécessité de distribuer l’eau et l’électricité, de mettre en place non seulement l’infrastructure de base, mais aussi les équipements nécessaires à l’approvisionnement en eau de telles ou telles régions, l’Etat se voit obligé d’utiliser certaines propriétés privées. Soit, mais dans ce cas, l’Etat doit tenir compte des droits du propriétaire.
Au Maroc et jusqu’à présent, une seule instance, la Cour Suprême, est compétente dans ce genre de contentieux opposant des citoyens à ’autorité ou des citoyens à l’Administration. Je fais là une nette distinction entre l’autorité, l’Administration et l’Etat.

La Chambre administrative n’a donc pas la possibilité d’examiner tous les dossiers et de trancher tous les contentieux, d’autant plus que de nos jours l’Etat met la main à tout. L’électricité et l’eau appartiennent à l’Etat, l’Etat se doit de mettre un terme à certains agissements de l’autorité, de l’Administration ou de l’Etat lui-même.

Nous aspirons à établir une Chambre administrative dans chaque préfecture ou province, mais nous ne disposons pas de juges spécialisés en la matière. Nous avons décidé dans une première phase, nous en chargeons particulièrement notre ministre de la Justice, de créer des tribunaux administratifs dans nos sept régions (2). Nous allons donc commencer par les régions. Les jeunes de l’Institut national des études juridiques doivent savoir que nous créerons un tribunal dans chaque province et toute province dotée d’une telle juridiction aura besoin d’au moins cinquante personnes. Il s’avère ainsi nécessaire de créer une section de droit administratif. J’implore le Très-Haut de réaliser mon souhait consistant en la création dans deux ou trois ans d’une Chambre administrative dans chaque province. Plus tard, les Chambres régionales deviendront les Chambres d’appel. Si l’accord n’est pas réalisé à propos de l’appel dans telle instance, il sera loisible au justiciable de saisir une autre Chambre. En cas de litige, les Chambres administratives au complet se réuniraient sous les auspices de la Chambre administrative de la Cour Suprême. Cette dernière aurait le dernier mot. Tel est le cadre véritable de l’Etat de droit. Pourquoi ? Parce qu’en l’occurence, le problème concerne le mot autorité. Certains sont coupables d’excès et d’abus de pouvoir, il y en a qui utilisent l’autorité à des fins autres que celles pour lesquelles elle leur a été confiée.

Il y a également d’autres problèmes, tels les recours en matière électorale. Ces recours sont examinés d’abord dans les provinces ou les régions avant de parvenir aux Chambres constitutionnelles et administratives de la Cour Suprême. Il y a aussi les affaires fiscales : Chaque Marocain devrait pouvoir introduire une action auprès de la Chambre administrative de sa province et devrait pouvoir crier : "C’est injuste, on a été trop cruel à mon égard". Le ministère de la Justice devrait créer aussi une section de droit fiscal. Nous avons fait un grand effort en ce qui concerne le système fiscal.

Nous envisageons une amnistie fiscale et demandons aux détenteurs de capitaux d’investir dans notre pays.

Mais ces derniers ont besoin de s’assurer au préalable que notre pays jouit des garanties nécessaires en matière fiscale.

Il nous importe d’abord de rendre justice à nos sujets. Nous ne devons, en aucun cas, ignorer les Droits de l’Homme. Ceux-ci enregistrent tantôt une avance, tantôt un recul. Ils ont avancé à Helsinki et reculé de nos jours. Voyez la Lituanie : Pourquoi Gorbatchev n’a pas dit à Bush : Que faites-vous au Panama ? Et pourquoi Bush n’a pas demandé à Gorbatchev : Que faites-vous en Lituanie ?

A Helsinki, la question des Droits de l’Homme n’était qu’acrobatie.
Tel est donc l’Etat de droit. L’autorité ne doit pas dépasser ses limites.
Tout marocain devrait pouvoir porter plainte contre l’officier de police ou de gendarmerie qui l’a maltraité ou contre le cadi. Pour ce qui est de l’Administration, un agent de la fonction publique licencié pour une raison qu’il n’estime pas suffisante pour justifier son licenciement, doit effectuer des déplacements à Rabat alors même que la Chambre administrative de la Cour Suprême est déjà encombrée.

Il y a également le cas du retraité, qui s’estime victime d’une injustice à la réception de sa pension non pas en raison d’une erreur d’autant plus que tout sera informatisé.

Il y a quelque temps, des relevés de redevances téléphoniques se sont avérés excessifs et ce qui est arrivé pour les téléphones, pourrait advenir aux pensions. Il dira alors : C’est injuste, j’ai pourtant sacrifié ma jeunesse au profit du service public . A qui doit-il recourir ? Il invoquera le code de procédure civile de 1913 qui s’applique pour ce genre d’affaires. Nous avons évoqué l’autorité et l’Administration. Pour ce qui concerne l’Etat, un homme constate un jour des travaux sur son propre terrain.

Le ministère de l’Education y est en train de construire une école, celui de la jeunesse, un terrain de sports, ou le ministère de la Justice ou celui des PTT sans en informer le propriétaire. Or, la loi est claire sur ce point : Le droit de propriété est garanti. Il ne peut être réduit ou modifié conformément à la Constitution que lorsque le terrain en question se trouve englobé par un plan de développement voté par la Chambre des Représentants.

Nous voulons être un État de droit et respecter la propriété privée, mais nous n’avons pas hésité à mettre la main sur des terrains privés sans égards pour la procédure afférente à l’expropriation, sans engager d’avocats pour évaluer le prix du terrain. Or, ce qui arrive, c’est que l’homme dépossédé peut être indemnisé quinze ou vingt ans plus tard et que, peut-être, il n’a obtenu que 10 ou même 2% de la valeur réelle à laquelle il a droit, le pouvoir libératoire de la monnaie ayant considérablement chuté. Au lieu d’encaisser, par exemple, 20 millions de telle époque, il perçoit 50 millions, valeur 90, alors qu’il se serait enrichi en 1970 avec seulement 10 millions. Je ne dis pas que l’Administration, le gouvernement ou l’Etat commettent de telles actions de façon délibérée, mais ce que Je leur reproche, c’est le non respect de la loi, alors même qu’il existe au sein de chaque ministère un service juridique et des conseillers juridiques rémunérés pour traiter ces questions.
Ne faisons pas comme ces écoliers dont le fquih disait : Ils ont la théorie en tête qu’ils appliquent de manière erronée . Il connaît bien la règle grammaticale, mais commet des fautes en parlant.

Nous se serons véritablement un État de droit que le jour où chaque Marocain disposera du moyen de défendre ses droits, quel que soit son adversaire.

Je vous donne un petit exemple. Dans les documents de Feu Mohammed V - paix à son âme - J’ai retrouvé quatre ou cinq plaintes provenant de la région de Marrakech, à "Akfa•", où nous avions des voisins. L’eau était rare et l’étranger qui s’occupait de la gestion ne respectait pas le jour qui n’était pas réservé à Sa Majesté pour la fourniture d’eau et en profitait. Les voisins vinrent se plaindre à plusieurs reprises. Feu S.M. Mohammed V leur avait dit : Intentez un procès, on ne sait jamais .

L’affaire vint à la Cour d’Appel du Makhzen. Sidi El Madani Bel Husni - que Dieu ait son âme - vint voir Sidna et lui dit : On a porté plainte contre vous, Sire. Que dois-je faire ?, Sidna répondit : C’est moi qui leur ai suggéré de porter plainte contre moi. Rendez votre jugement pour que cesse cette affaire .

Je conserve quatre jugements avec fierté et qui ont été appliqués et ont permis de remettre les choses en ordre. Car nous, tous, sommes égaux devant Dieu et devons l’être devant la loi.

Cher peuple,

Messieurs,

Tels sont les points essentiels. Certains, comme le Conseil consultatif des Droits de l’Homme, peuvent dès à présent être mis en application. D’autres verront les textes s’y rapportant après rédaction qui est actuellement en cours soumis à l’examen du Conseil du gouvernement puis à nous, en Conseil des Ministres.

J’espère que tous ces textes seront adoptés avec amendements s’il y a lieu lors de la session parlementaire du printemps. Les députés les complèteraient s’ils les jugent insuffisants. Tel est le rôle des parlementaires d’autant plus que le Bureau de la Chambre est présent parmi nous. Si vous parvenez à adopter ces textes, votre session sera très importante et vous aurez bâti une bonne partie du Maroc, État de droit que nous voulons. J’implore Dieu que ce pays fondé sur le droit, bien que, personnellement, Je crois que le climat international influera sur celui de chaque État. De nos jours, le parti unique est devenu une sorte de SIDA. Chacun fuit la dictature comme on fuit une maladie transmissible. Il n’est pas pensable qu’un jour, dans un État démocratique doté d’un parlement, un civil ou un militaire vienne rassembler puis conduire en prison tous les gens réunis. Je crois qu’au moins, le monde connaîtra une paix internationale. Nous aurons perdu notre temps, si le Maroc ne profitait pas de cette paix mondiale pour élaborer en toute quiétude et sérénité des lois adaptées à sa situation et aux réactions de son peuple, car chaque peuple à ses propres réactions. Utilisons cette trêve internationale et Je m’adresse là aux ministres et aux parlementaires, pour qu’en matière sociale et économique, nous construisons rapidement un édifice solide. Tous, vous en êtes capables.

Le Très-Haut a dit : Si vous faites triompher la parole de Dieu, il vous accordera victoire .